" La bigorexie, parfois appelée sportoolisme, est une dépendance à l'activité physique qui concerne les personnes devenues dépendantes par suite d'une pratique excessive du sport."
Sport à tout prix ? Dépendance à l’exercice physique et soins de santé primaires en contexte français : traduction française et validation de l’Exercise Addiction Inventory

Il est admis que la pratique d’une activité sportive régulière est bénéfique pour la santé. Pratiqué en excès, l’exercice physique (EP), peut entraîner blessures physiques et mal-être psychique.
L’objectif de cette étude est la validation transculturelle d’une échelle de dépistage des sujets présentant un risque de dépendance à l’exercice physique : l’Exercise Addiction Inventory (EAI).
Matériel et méthodes : Premièrement nous avons élaboré une version française de l’EAI. Puis nous avons testé ses propriétés psychométriques par une étude observationnelle, prospective, transversale et multicentrique entre Octobre 2015 et Février 2016.
Résultats : Notre version française de l’Exercise Addiction Inventory est une échelle lisible, compréhensible avec une bonne acceptabilité. La consistance interne est très satisfaisante avec un coefficient alpha de Cronbach à 0.73. La stabilité temporelle est acceptable.
275 #sportifs amateurs ont répondu à l’Exercise Addiction Inventory lors d’une consultation chez le médecin généraliste. 17.45% ont obtenu un score à l’Exercise Addiction Inventory ≥ à 24 et sont identifiés à risque de #dépendance à l’exercice physique.
Les sujets pratiquant plus de 5 h d’exercice physique hebdomadaire ont un risque plus élevé de dépendance que ceux ayant une durée de pratique inférieure à 2,5 h [OR=3.46].
L’Exercise Addiction Inventory en français mesure, au travers de ses 6 items corrélés, le concept de dépendance à l’exercice physique. Les indices d’ajustement sont satisfaisants, traduisant la construction solide de l’Exercise Addiction Inventory en français.
Conclusion : L’Exercise Addiction Inventory en français s’avère être un outil de base valide et fiable. Par ses qualités pratiques et psychométriques il semble être un outil approprié pour les médecins, leur permettant de dépister les sportifs à risque de dépendance à l’#exercice #physique.
Historique
En 2004, Terry, Szabo et Griffiths constatent que l’addiction à l’exercice physique n’est pas suffisamment dépistée par les médecins généralistes. Ils incriminent les outils disponibles à cette époque : leur mise en œuvre prend beaucoup de temps, le calcul du score obtenu est fastidieux et l’interprétation en est complexe. Partant de ce constat, ces auteurs développent une nouvelle échelle de mesure de l’addiction à l’exercice physique : l’Exercise Addiction Inventory (EAI).
L’objectif est qu’elle soit pratique, très courte et permette d’identifier les personnes à risque d’addiction à l’exercice physique. Cette échelle est basée sur la définition de l’addiction comportementale développée par Griffiths en 1996 (22). Griffiths définit l’addiction à l’exercice physique à partir de six composantes.
- Salience : c’est l’activité particulière devenant l’activité la plus importante de la vie de la personne, en focalisant ses pensées, ses sentiments et son comportement. Par exemple, si la personne n’est pas en train d’exercer l’activité en question, elle va y penser jusqu’à ce qu’elle la pratique de nouveau ;
- Conflict : ce sont soit les conflits interpersonnels qui surviennent entre la personne « addict » et son entourage, soit les conflits intrapsychiques qui concernent l’individu lui-même. Le sujet choisit le plaisir à court terme et le soulagement immédiat, sans tenir compte des conséquences défavorables et des dégâts à long-terme qui, en retour, augmentent le besoin apparent de pratiquer l’activité addictive comme moyen pour supporter ces pensées ;
- Mood modification : c’est l’expérience subjective que les personnes ressentent comme une conséquence de la pratique de leur activité spécifique ;
- Tolerance : c’est le processus par lequel l’augmentation de la quantité de pratique de l’activité est nécessaire pour parvenir à l’effet ressenti antérieurement. Par exemple, un joueur peut augmenter progressivement la valeur du pari pour vivre l’euphorie ressentie auparavant avec une mise moins importante ;
- Withdrawal symptoms : C’est un sentiment désagréable et/ou un mal être physique qui apparaît à l’arrêt ou à la diminution brutale de l’activité ;
- Relapse : c’est la facilité à laisser se réinstaller très rapidement les comportements liés à l’activité en question. Les comportements les plus extrêmes sont très vite rétablis même après plusieurs années d’abstinence ou de contrôle.
Établie à partir de cette définition, l’EAI se compose donc de 6 items reprenant les 6 composantes décrites ci-dessus. Chacun des items est côté par une échelle de type Likert en 5 points. L’EAI est un auto-questionnaire rapide et simple à remplir. Le score total de l’EAI se calcule facilement par l’addition des notes attribuées à chacun des 6 items

Version finale française :

Inès Ferreira. Sport à tout prix ? Dépendance à l’exercice physique et soins de santé primaires en contexte français : traduction française et validation de l’Exercise Addiction Inventory.
Médecine humaine et pathologie. 2016.